«Contraints de fuir comme Jésus-Christ. Accueillir, protéger, promouvoir et intégrer les déplacés internes»: voici le thème de ce message présenté en mai dernier par la section migrants et réfugiés du dicastère pour le Service du Développement humain intégral.
En préambule de ce message, le Pape observe que l’actuelle pandémie du coronavirus a «redimensionné» de nombreuses urgences humanitaires, «reléguant initiatives et aides internationales (…) au fin fond des agendas politiques nationaux». A l’aune de la présente crise sanitaire, ce message est étendu «à tous ceux qui ont vécu et continuent de vivre des situations de précarité, d’abandon, d’exclusion et de rejet à cause du Covid-19».
Un drame invisible
Le Pape part de l’épisode évangélique de la fuite en Égypte (Mt 2, 13-15.19-23), lorsque la Sainte Famille fait l’expérience de la «condition tragique de personne déplacée»; un drame, souvent invisible, qui concerne aujourd’hui des millions de familles. En chacune de ces personnes, «Jésus est présent», «sur leurs visages, nous sommes appelés à reconnaître le visage du Christ affamé, assoiffé, nu, malade, étranger et prisonnier qui nous interpelle». En définitive, «les personnes déplacées nous offrent cette occasion de rencontre avec le Seigneur».
Accueillir, protéger, promouvoir et intégrer : ce sont les quatre verbes indiqués à plusieurs reprises par le Pape pour répondre à l’immense défi que représente la question migratoire. À ces pierres angulaires de l’action pastorale de l’Église en la matière, le Saint-Père en adjoint six autres paires, soit 12 verbes qui «correspondent à des actions très concrètes, liés entre eux dans une relation de cause à effet».
Connaître pour comprendre
«La connaissance est une étape nécessaire vers la compréhension de l’autre», argue le Pape, pour qui l’on s’arrête trop souvent aux chiffres, oubliant que les migrants sont avant tout des personnes à connaître. «En connaissant leurs histoires, nous parviendrons à les comprendre» et comprendre ainsi que la précarité s’avère être un «élément constant de la vie des personnes déplacées».
Se rendre le prochain pour servir
François s’appuie là sur la parabole du bon Samaritain (Luc 10, 33-37), faisant remarquer combien les «les peurs et les préjugés» nous font garder nos distances avec les autres et nous empêchent de «les servir avec amour». Or, s’approcher du prochain signifie être disposé à prendre des risques, «comme nous l’ont enseigné de nombreux médecins, infirmiers et infirmières ces derniers mois». Se faire proche de son frère, le servir «va au-delà du pur sens du devoir», souligne le Pape qui prend l’exemple du Lavement des pied (Jn 13, 1-15).
Écouter pour se réconcilier
C’est justement pour entendre «les gémissements de l’humanité avec des oreilles humaines» que Dieu a envoyé son Fils dans le monde, car «l’Amour, celui qui réconcilie et qui sauve, commence par l’écoute». Mais force est de constater que l’attitude de l’écoute se perd tandis que les messages se multiplient, remarque le Pape.
Durant ces semaines de confinement, le silence «dramatique et inquiétant» qui a régné dans les rues a permis «d’écouter le cri des plus vulnérables, des personnes déplacées et de notre planète gravement malade», affirme le Saint-Père qui insiste : seule une écoute humble et attentive peut favoriser la réconciliation.
Partager pour grandir
«Dieu n’a pas voulu que les ressources de notre planète ne profitent qu’à quelques-uns», martèle le Souverain Pontife. Le partage, si caractéristique des premières communautés chrétiennes, est nécessaire pour «grandir ensemble», note-t-il encore. «La pandémie nous a rappelé que nous sommes tous dans le même bateau» et que «personne ne peut s’en sortir tout seul».
Impliquer pour promouvoir
C’est ce que Jésus a fait avec la Samaritaine (Jn 4, 1-30). L’élan pour servir les autres nous empêche parfois de voir leurs richesses. Or, si nous voulons réellement promouvoir les personnes que nous aidons, «nous devons les impliquer et les rendre protagonistes de leur propre relèvement». La pandémie nous a rappelé l’importance de la coresponsabilité et de la contribution de tous, comme moyens de résoudre la crise.
Collaborer pour survivre
La construction du Royaume de Dieu implique nécessairement l’engagement de tous, insiste le Pape ; pour cela, il faut renoncer aux tentations de la jalousie, de la discorde et de la division, presse-t-il, reprenant ses propres mots lors de son message Urbi et Orbi du 12 avril dernier. «Pour préserver la maison commune et faire en sorte qu’elle ressemble toujours davantage au projet originel de Dieu, nous devons nous efforcer de garantir la coopération internationale, la solidarité globale et l’engagement local, sans laisser personne en dehors».