30... Vous avez dit 30 Mr. le président !
Sans entrer dans la polémique qui prend une certaine ampleur depuis que le 1er ministre a confirmé l’annonce du président de la république limitant à 30 personnes le nombre de fidèles pour la messe dominicale, je dois avouer ma tristesse et mon amertume.
Celles-ci s’étaient déjà réveillées en moi lorsque des fidèles avaient hurlé leur droit à la messe devant des églises et des cathédrales dans certaines villes dont Bayonne. En effet, ces personnes se disant très catholiques, réclamaient la messe parce qu’elle était absolument nécessaire sinon vitale pour leur foi chrétienne. C’est tout à leur honneur, mais se souciaient-elles pour autant de leurs ‘frères et sœurs’ de la plupart des campagnes françaises, privés depuis longtemps de messe et de communion, faute de prêtres pour la célébration ? Que d’églises fermées ou vides par manque de célébrant ? Combien de communautés souffrant en silence parce que privées d’eucharistie, même à quelques kilomètres de Bayonne? Qui s’en préoccupe ?
Certainement pas ces enfants gâtés de nos villes qui font un caprice dès que ‘leur messe’ n’est plus possible dans ‘leur église’ par mesure sanitaire, et donc pour se protéger mutuellement d’un virus invisible et pourtant bien réel et dangereux! Cela n’est-il pas une mise en application concrète de l’Evangile ? Evangile, Parole de Dieu, présence du Christ, tout comme les plus humbles, les plus petits, qui sont visages du Christ.
Prennent-ils au sérieux le manque de réponse à l’appel que le Seigneur ne cesse de faire pour que l’eucharistie continue d’être célébrée toujours et partout ? Qui accepte de répondre aujourd’hui à cet appel ? Ah pour consommer du culte, certains savent s’organiser et communiquer pour se réunir en nombre et manifester, quitte à se mettre à genoux sous la pluie et chanter des cantiques ponctués de slogans revendicatifs! Mais pour accueillir l’appel ou l’invitation à suivre le maître en lui consacrant toute sa vie, il n’y a plus grand monde !
Telle était ma première amertume jusqu’à ce matin de jeudi!
Et voici qu’elle redouble maintenant en découvrant un président de la république qui joue double jeu, d’une part en rassurant par téléphone le président de l’épiscopat français au soir même de sa déclaration à la nation, en lui promettant davantage de souplesse pour permettre à plus de 30 fidèles de se réunir le dimanche, et qui par la voix de son 1er ministre, le surlendemain, maintient rigoureusement la même règle. Se serait-il laissé aller au mensonge ? Ne craint-il pas pour sa crédibilité ? Quelle confiance accorder ?
De nombreuses voix ont dénoncé avec justesse le manque de réalisme d’une telle jauge et son inadaptation à la capacité d’accueil des églises. Une cathédrale, une petite église de campagne ou une chapelle... ce n’est pas la même chose ! Les possibilités de distanciation ne sont pas comparables, pour ne souligner que cet aspect. Pourquoi 30 et non pas 35 ou 50... Le virus saurait-il donc faire la différence?
De mon côté, comme curé, je ne me sens pas chargé de surveiller l’entrée de l’église, elle reste ouverte le dimanche comme les autres jours. Entre qui veut. J’ai confiance dans les fidèles qui auront l’attitude qui convient pour éviter la propagation du virus. Comme d’habitude, ils auront à leur disposition le liquide ‘purificateur’, garderont la bonne distance et le masque sur le visage. La prudence de chacun reste la règle, comme auparavant.
Ensemble, prenons humblement notre mal en patience et continuons de faire communauté autrement, sans renier notre double attachement au Christ et à nos frères et sœurs avec lesquels nous avons l’habitude de communier, et tous ceux envers lesquels nous sommes en devoir de bienveillance, de charité et de fraternité. Ainsi nous rejoignons aussi le Christ !
Ne nous divisons pas à coup de revendications et surtout, ne nous laissons pas récupérer par ceux qui, sournoisement, n’ont d’autres buts que de trouver de nouveaux sympathisants ou de futurs électeurs.
En attendant le plaisir de nous retrouver nombreux autour du Christ pour célébrer sa mort et sa résurrection, et dans quelques semaines sa naissance en terre humaine, et partager la vie qu’il nous donne en son corps et en son sang, continuons de faire Eglise. Bon courage à chacun !
Dominique Errecart, curé