Billet d'humeur

Billet d'humeur

Fratelli tuti

 

    Avec un peu de chance vous avez peut-être remarqué dans Sud Ouest de lundi, ce petit article de 11 lignes, sans titre. On y disait qu'au large de la Tunisie, de nouveaux corps de migrants avaient été repêchés portant le bilan du naufrage d'un cayuco, la veille,  à 13 morts et  9 disparus dont sept femmes et 3 enfants dont l'un avait moins de six mois. Une broutille qui ne valait pas plus de onze lignes pour ces 22 morts. Ni d'une plachotte à la télé. Ce n'était que des nègres au fond. 

    Quelques jours auparavant ce ne sont pas onze lignes mais des pages entières, sur plusieurs jours,  qui nous avaient raconté avec tous les détails les malheurs de ces habitants d'une vallée des Alpes Maritimes frappés par des inondations catastrophiques. Il faut reconnaître que ces maisons écroulées, ces voitures emportées par les eaux, ces routes effondrées avaient une valeur marchande autre pour les écrans de télévisions. Il y avait tout ce qu'il fallait pour apaiser la soif d'adrénaline des téléspectateurs, confortablement installés dans leurs fauteuils, à l'abri de tout risque pour eux mêmes. L'audimat a monté en flèche. Les téléspectateurs se sont couchés la conscience tranquille, non sans avoir essuyé une larme sous l'œil gauche : ils avaient compati à la misère de ces pauvres gens écrasés par le malheur.

    Les victimes  étaient 22 au Sud comme au Nord de la Méditerranée. Mais chacun sait qu'en musique il faut deux noires pour faire une blanche. Dans notre société civilisée il en faut bien plus. Et ce négrillon de six mois, on ne l'a même pas vu! Comment voulez-vous que nous compatissions? 

    Continuellement matraqués par des présentations de ce type, nous finissons par penser en fonction de ce que nous voyons.

Xipri

 

Ah! J'allais oublier. Entre temps nous avons eu droit à trois pages entières dont la une et l'édito, sur le bien être des animaux. Qui n'a pas compati ?